
L’histoire d’une noix c’est d’abord une histoire de patience. De la patience si profonde que le temps
s’arrête, il n’existe pas. Regardez le Noyer ; tout le monde est impatient de fêter le printemps, après quelques jours de soleil seulement et un peu de chaleur douce et voilà des bourgeons si naïf, si jeunes, si
joueurs se hâtent de se montrer comme s’ils n’avaient rien appris des années précédentes. Le Noyer, lui, il attend, il médite, il n’a pas besoin de toute cette effervescence. Il prend son temps.
A son rythme, sans agitation excessive, il va passer sa saison. Il va former ses fruits, des centaines de petits « cerveaux » si bien protégés; mais il faut patienter, attendre ce moment où le Noyer voudra partager sa sagesse avec nous.
L’automne est là avec sa mélancolie, sa beauté en couleur ocre et son odeur si fraîche, transparente et triste. C’est le temps parfait pour ramasser des noix. On ramasse en silence et chacun dans ses pensées. Il faut revenir plusieurs fois sous le même arbre, il faut laver et sécher les noix. Sécher plusieurs jours et plusieurs semaines, venir voir si tout va bien et mélanger doucement en prenant le temps.
Je ne veux pas parler ici à propos de tous les bienfaits de la noix ; on pourrait écrire des articles entiers, on pourrait lire des études scientifiques … et oui, on a besoin de preuves. Sommes- nous capables d’écouter et de voir ce qui est déjà là?
On casse les noix une par une… on trie…
J’apporte mes noix chez un artisan local. Son père a construit le moulin au début des années quarante. Le vieux moulin est incrusté dans la roche où les pierres gardent les secrets des noix, où le mécanisme fidèle connaît son travail. Le matin, la pierre imposante en granit reprend son boulot. Elle réussit à écraser les cerneaux si délicatement… Je pense même qu’elle a compris la relation des noix avec le temps. Et tout semble avoir pris le rythme, le rythme dont le Noyer détient le secret.
La meule et le temps ayant fait leur œuvre, mes cerneaux sont maintenant transformés en pâte. Celle-ci va
être chauffée doucement, remuée en permanence et peu à peu les noix vont se détendre et révéler leurs parfums. C’est le moment de passer au pressage. Ma pâte de noix a déménagé dans une toile de tissu brut. C’est le moment d’admirer le travail du maitre- artisan. Ses gestes sont délicats et précis. Soigneusement il dispose mes noix pour obtenir le précieux liquide… Après quelques minutes de douce pression le goûteux nectar apparaît.
Mais patience ! Il doit maintenant se reposer quelques semaines…
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